Augustin-Joseph
DECLERCQ,
tringlot
de
la
Grande
Armée.
Le
3
mai
1793,
dans
une
modeste
demeure
du
hameau
de
la
Glacenée,
en
la
paroisse
d’Acren-Saint-Martin,
seigneurie
de
Grand-Acren,
Anne-Joseph
Berlengé,
seconde
épouse
d’Augustin
DECLERCQ,
donnait
la
vie
à
son
quatrième
fils,
Augustin-Joseph
;
quatre
autres
fils
allaient
naître
encore
après
lui.
Son
père,
Augustin,
avait
été
un
«
censier
»
et
étalonnier
aisé
jusqu’au
décès,
le
20
mai
1781,
de
sa
première
épouse,
Marie-Elisabeth
Demarbaix,
qui
lui
avait
donné
deux
filles
et
deux
fils.
Un
conflit
s’était
alors
élevé
entre
Augustin
Declercq
et
Jean-Baptiste
Taintenier,
seigneur
de
Grand-Acren,
au
sujet
de
la
perception
du
droit
de
meilleur
cattel
(en
l’espèce,
un
étalon
reproducteur
qui
faisait
la
fierté
d’Augustin),
conflit
qui
allait
trouver
son
épilogue
après
un
coûteux
procès
devant
la
Cour
des
Mortemains
de
Hainaut
en
1784.
Condamné
à
remettre
le
meilleur
cattel
à
Taintenier,
Augustin
allait
devoir
nourrir
sa
nombreuse
famille
en
exploitant
quelques
parcelles
de
terrain
qui
lui
restaient.
Augustin-Joseph,
lui,
journalier
et
tisserand,
est
appelé
le
18
octobre
1812
à
Lessines,
chef-lieu
du
canton,
pour
procéder
au
tirage
au
sort
des
conscrits
de
sa
classe.
Le
numéro
21
lui
échoit
et,
n’ayant
aucune
raison
d’invoquer
un
quelconque
droit
à
l’exemption,
il
se
rend
à
Mons
le
12
novembre
pour
y
être
passé
en
revue
et
dirigé
sur
le
corps
auquel
il
est
destiné.
Il
s’agit
du
96ème
régiment
d’infanterie
de
ligne,
qui
est
caserné
à
Thionville.
Il
y
est
incorporé
le
25
novembre
sous
le
numéro
matricule
9.258
et
y
reste
en
instruction
jusqu’en
janvier
1813,
quand
il
est
versé
dans
le
train
d’artillerie.
C’est
qu’en
effet
il
sait
soigner
les
chevaux
et
conduire
les
voitures.
Son
signalement
est
alors
le
suivant
:
«
taille
d'un
mètre
soixante-six,
visage
ovale,
front
rond,
yeux
gris,
bouche
et
nez
moyens,
menton
rond,
cheveux
et
sourcils
châtains,
atteint
de
petite
vérole
».
Le
20
janvier
1813,
il
passe
donc
sur
les
rôles
de
la
1ère
compagnie
du
11ème
bataillon
principal
du
train
d’artillerie
à
Metz
(matricule
2354)
et
commence
une
nouvelle
instruction,
apprenant
à
soigner
les
chevaux
selon
le
règlement
et
à
atteler
et
manœuvrer
les
affûts
et
les
caissons.
Le
23
février,
la
compagnie
quitte
Metz
sous
la
direction
du
lieutenant
Quentin
pour
rejoindre,
par
Mayence,
Francfort
et
les
montagnes
du
Harz,
la
place
forte
de
Magdebourg.
Elle
sera
attachée
à
la
17ème
division
d’infanterie
(général
baron
Puthod)
du
5ème
corps
(corps
d’observation
de
l’Elbe)
du
général
comte
de
Lauriston.
En
mars,
la
division
est
envoyée
à
Stendal
pour
surveiller
la
rive
gauche
de
l’Elbe.
Le
29
mars,
elle
est
détachée
du
corps
d’observation
de
l’Elbe
pour
passer
sous
le
commandement
supérieur
du
maréchal
Davout.
C’est
à
Stendal,
le
31
mars,
que
le
matériel
d’artillerie,
conduit
par
la
1ère
compagnie
du
11ème
B.
P.
T.
A.,
rejoint
la
division,
avec
laquelle
elle
opèrera
dans
cette
région
sur
la
rive
gauche
de
l’Elbe
jusqu’à
Lunebourg,
repoussant
les
incursions
des
cosaques.
Le
18
mai,
le
général
Puthod
reçoit
du
maréchal
Ney
l'ordre
de
cesser
de
suivre
le
mouvement
de
Sébastiani
et
de
se
diriger
vers
Hoyerswerda
pour
rejoindre
le
5ème
corps.
En
douze
jours,
sans
aucun
repos,
elle
parcourra
ainsi
près
de
cinq
cents
kilomètres
pour
déboucher
le
21
vers
5
heures
du
soir
sur
le
champ
de
bataille
de
Bautzen
et
participer
activement
à
l’attaque
de
Würschen
puis,
les
jours
suivants
à
la
poursuite
de
l’ennemi
en
retraite.
On
traverse
ainsi
successivement
la
Neisse
et
la
Queiss
puis
le
Bober.
Le
26
mai,
la
division
appuie
la
16ème
lors
du
combat
de
Michelsdorf
puis
combat
le
31
à
Neukirch,
sur
la
Lohe.
Le
1
juin,
les
troupes
traversent
Breslau,
sur
l’Oder
et
le
lendemain,
une
suspension
d’armes
est
signée
entre
les
belligérants.
Pendant
l’armistice
de
Pleiswitz,
la
division
sera
cantonnée
dans
le
cercle
de
Goldberg
et
Hainau
et
Augustin-Joseph
pourra
récupérer
et
prendre
un
relatif
repos.
Il
assistera
à
la
remise
des
Aigles
par
l’Empereur
et
à
la
célébration
anticipée
de
son
anniversaire,
le
12
août.
Les
hostilités
reprennent
à
la
mi-août
et
le
5ème
corps
d’infanterie
se
retrouve
face
aux
russo-prussiens
de
Blûcher.
L’Empereur
marchera
très
souvent
avec
ce
corps
et
Augustin
racontera
que
chaque
fois
qu’il
paraissait
devant
ses
troupes,
tous
les
hommes
se
dressaient
«
comme
des
diables
hors
d’une
boîte
»
en
criant
«
Vive
l’Empereur
».
Après
avoir
brillamment
combattu
près
de
Goldberg
le
23
août,
la
17ème
division
est
détachée
de
son
corps
d’armée
qui
combat,
par
un
temps
terriblement
pluvieux,
sur
la
Katzbach,
et,
prise
dans
les
inondations
du
Bober,
elle
sera
totalement
anéantie
le
29
août
devant
Löwenberg.
Augustin-Joseph,
avec
quelques
autres,
parviendra
à
rejoindre
le
5ème
corps,
se
nourrissant
pendant
des
jours
de
tiges
de
choux.
Le
personnel
de
l’artillerie
rescapé
du
désastre
sera
alors
versé
au
parc
général
du
corps.
Puis
ce
sera
la
Bataille
des
Nations
à
Leipzig
(du
16
au
19
octobre
1813).
Augustin-Joseph
sera
dans
les
derniers
à
pouvoir
traverser
le
pont
de
Lindenau
avant
son
explosion.
C’est
alors
la
retraite
vers
la
France,
au
cours
de
laquelle
il
est
atteint
par
l’épidémie
de
typhus,
puis
le
dur
hiver
de
la
campagne
de
France
qu’il
fait
au
Grand
Parc
Général
de
l’armée
;
il
aura
les
pieds
gelés
dans
ses
bottes
qu’il
ne
pourra
ôter
pendant
trois
mois
;
quand
enfin
il
pourra
se
déchausser,
sa
peau
était
noire
et
collait
à
l’intérieur
de
ses
bottes.
Pendant
des
mois
il
n’avait
eu
pour
seul
toit
que
les
caissons
et
les
pièces
d’artillerie
qu’il
conduisait.
Après
la
chute
de
l’Empire,
il
sera
renvoyé
dans
ses
foyers
comme
étranger
le
6
août
1814.
Il
rentre
alors
à
Deux-Acren
où
il
reprend
son
métier
de
cultivateur.
Il
attendra
le
12
novembre
1832
pour
y
épouser
Amélie
Cauchie,
sa
cadette
de
dix
ans
;
elle
lui
donnera
deux
filles
et
deux
fils
à
qui
il
racontera
ses
aventures
dont
des
bribes
sont
ainsi
parvenues
oralement
jusqu’à
nous.
En
1858,
il
recevra
la
Médaille
de
Sainte-Hélène
et
mourra
dans
sa
maison
du
hameau
de
la
Glacenée
à
Deux-Acren
le
jour
de
Noël
1870,
presque
trois
mois
après
son
épouse
Amélie,
alors
que
son
fils
cadet
Joseph,
qui
allait
devenir
brigadier
des
gardes-champêtres
du
canton
de
Lessines,
incorporé
dans
l’armée
belge,
veillait
avec
elle
à
l’intégrité
du
territoire
national
alors
que
s’affrontaient
une
fois
encore
la
Prusse
et
l’Empire
Français.
Jacques
Declercq
-
Fleurus
-
Mai
2004
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